Directrice générale et artistique de la salle Bourgie du Musée des beaux-arts de Montréal et d’Arte Musica

Forte d'une solide expérience dans le milieu culturel québécois comme gestionnaire, musicienne et pédagogue, Isolde Lagacé est la directrice générale et artistique de la salle Bourgie du Musée des beaux-arts de Montréal et d’Arte Musica, en résidence au Musée.

Depuis sa mise sur pied en 2008, Arte Musica chapeaute annuellement quelque deux cents évènements musicaux au Musée, que ce soit des concerts, des conférences, des films, des ateliers ou des matinées scolaires, auxquels assistent près de 50,000 personnes.

Précédemment, elle a été directrice du Conservatoire de musique de Montréal de 2000 à 2007 et, de 1992 à 2000, directrice du département des Concerts et de la publicité à l’École de musique Schulich de l’Université McGill où elle gérait les salles de concert Pollack et Redpath.

Diplômée de l’Université de Montréal en musique et en éducation ainsi que de l’École des Hautes Études Commerciales en gestion, elle a été chargée de cours en gestion des arts à l’Université de Montréal et à l’Université du Québec à Trois-Rivières et a consacré, pendant plus de 20 ans, une partie de ses étés à l’enseignement de la musique à l’Académie du Domaine Forget et au Centre musical CAMMAC.

Très engagée dans le milieu musical, Isolde Lagacé a été présidente du Conseil québécois de la musique en 1997-1998 et membre de nombreux comités et conseils d'administration d’organismes musicaux. Elle siège régulièrement sur les jurys de divers conseils des arts et concours nationaux.

Isolde Lagacé

Photo: Pierre-Étienne Bergeron

Questions et réponses
Dans quelle ville habitez-vous ?
Montréal
Quelle est votre principale activité musicale professionnelle actuellement ?
Directrice de la salle Bourgie
En plus de votre activité principale, dans quelles autres activités musicales êtes-vous actuellement impliqué(e) ?
Les concerts à la salle Bourgie occupent toute la place dans ma vie professionnelle !
Où avez-vous fait vos études musicales ?
À l’Université de Montréal (baccalauréat et maîtrise spécialisés en interprétation du clavecin) et aux HEC (D.E.S.S.G.O.C.)
Qui ont été vos professeurs les plus importants ou significatifs, et qu’est-ce qui les rendait importants pour vous ?
En musique : Réjean Poirier, claveciniste et organiste, devenu par la suite doyen de la faculté de musique de l’Université de Montréal.

Réjean avait été un élève de mon père, l’organiste Bernard Lagacé, au Conservatoire de musique de Montréal, et comme tous les élèves de mes parents, il se retrouvait régulièrement à la maison quand j’étais plus jeune. Il représentait pour moi la position esthétique que mes parents défendaient (le renouveau de la musique ancienne dans les années 60 et 70) et c’est tout naturellement que je l’ai retrouvé comme professeur lorsque j’ai décidé, assez tardivement, d’entreprendre des études de clavecin.

En administration : Laurent Lapierre, professeur titulaire de la Chaire de leadership à HEC Montréal

Laurent a été le premier professeur que j’ai rencontré à HEC lors de mon diplôme en gestion d’organismes culturels. En passant, j’ai été la première finissante de ce programme, en 1989 (avec deux autres collègues) car je m’étais inscrite à temps plein dès l’annonce de ce nouveau programme, que j’attendais depuis longtemps, ayant un goût prononcé pour l’administration.

Le cours de Laurent portait sur le leadership et la gestion des entreprises culturelles et il utilisait la méthode des cas comme méthode de travail. Pour la musicienne que j’étais, un peu anxieuse à l’idée de suivre un cours de gestion dans une école de gestion, ça a été le « coup de foudre académique » immédiat ! Je suis restée en contact avec Laurent depuis toutes ces années et j’ai encore énormément d’admiration pour son travail.
Quels musiciens admirez-vous particulièrement, et pourquoi ?
Question vaste ! D’abord, je dois dire que j’ai une énorme admiration pour tous les musiciens. Persévérer dans une discipline aussi difficile que la musique mérite d’emblée tout notre respect. Mon travail m’amène à rencontrer des interprètes quotidiennement et je suis toujours impressionnée par leurs qualités artistiques et personnelles. La quantité de travail que les musiciens doivent accomplir pour « réussir », et la persévérance et la passion dont ils font preuve sont proprement prodigieuses.
Pouvez-vous identifier un âge ou une période de votre vie où vous avez décidé de vous diriger en musique ?
J’ai toujours su que j’évoluerais dans un domaine artistique. J’étais attirée par tous les arts d’interprétation. J’ai étudié la danse classique à l’École supérieure des Grands Ballets Canadiens durant de nombreuses années et j’ai même dansé professionnellement dans une petite compagnie à Toronto à l’âge de 18 ans. Parallèlement, j’ai fait du théâtre durant toutes mes années au secondaire. Quelques amis et moi avions fondé une troupe, « Les Raisons Verts » et nous présentions des pièces d’Ionesco, Nathalie Sarraute, Geroges Bataille, Claude Gauvreau à notre école, l’École secondaire Saint- Luc. Je me suis prise au jeu et j’ai même organisé une tournée dans les écoles du Québec qui avait bien marché. J’avais déjà la piqure de l’organisation et de la diffusion !

J’ai aussi organisé l’Intégrale de l’œuvre d’orgue de J. S. Bach pour mon père à l’Église de l’Immaculée-Conception à Montréal (un très bel orgue mécanique von Beckerath, le facteur du magnifique orgue de l’Oratoire Saint-Joseph. C’était un projet d’envergure (12 concerts répartis sur deux saisons) et j’étais responsable d’absolument tout (publicité, billetterie, budgets, etc), sauf de jouer bien sûr ! Ça a été un grand succès (l’Église était remplie à chaque concert avec plus de 1,000 personnes !) et j’ai énormément appris en gérant ce projet. Encore une fois, la piqure de la diffusion ! Et c’est peut-être à ce moment-là aussi que j’ai développé ce gout pour les intégrales. À la salle Bourgie, je présente actuellement l’intégrale des cantates de Bach, 64 concerts répartis sur 8 ans ! Nous entreprenons cette saison notre 6e année et les salles sont encore là toujours pleines ! Et c’est sans parler des autres intégrales (Sonates pour piano de Beethoven et de Mozart, Quatuors à cordes de Beethoven, œuvre pour piano de Brahms, etc.).

Bref, je savais que je travaillerais dans le milieu culturel, et sans doute à cause de mes antécédents familiaux (une famille de musiciens), je me suis tout naturellement retrouvée à évoluer dans le milieu de la musique classique. Ça allait de soi.
Quel est le principal défi que vous avez rencontré dans votre carrière et comment l’avez-vous relevé ?
Des défis, on en rencontre à tous les jours. Je crois que la façon dont on les relève est une question d’attitude. Un défi peut devenir un motivateur puissant ! Et on peut le tourner positivement et à son avantage ! Je n’ai pas d’exemple précis à donner, mais je sais que l’important pour moi est d’atteindre mon but, que le chemin pour y parvenir soit en ligne droite ou non.
À votre avis, quelles sont les 3 compétences non musicales les plus essentielles au succès d’une carrière en arts ?
La persévérance
La passion
Le travail (« cent fois sur le métier remettez votre ouvrage »...j’aime bien cette expression !)
Qu’est-ce qui vous motive à persévérer ?
L’amour de la musique et des arts
L’envie de partager avec tous ce qui me comble profondément.
Quel est le besoin le plus criant du milieu actuellement, et comment aimeriez-vous y remédier ?
Oh là là....C’est une question profonde et essentielle; c’est une question de société !

Le financement est souvent le nerf de la guerre. Il fait vraiment être très créatif pour arriver à nos fins avec le peu de financement disponible.

La place de la musique et des arts dans la société : dans les écoles, dans les médias, doit également être débattue. Nous, les artistes et les travailleurs culturels, nous y croyons fermement. Mais les gouvernements ? Les médias ?
Si vous aviez un seul conseil à donner à un aspirant musicien, quel serait-il ?
Persévère.